Chapelle San Bastianu - 20 janvier
Sébastien eut la France pour berceau; c'est un de ses plus glorieux enfants, un de ses saints les plus populaires. Né vers l'an 260, à Narbonne, dans le midi des Gaules, d'un gentilhomme du pays et d'une dame de Milan, il quitta bientôt sa patrie, pour suivre ses parents dans la capitale du Milanais, où les tendresses de sa famille maternelle l'attendaient impatiemment.
Issu d'une noble race, le jeune Sébastien fut élevé dès sa plus tendre enfance avec des soins exquis. Un naturel heureux, des maîtres habiles, une éducation choisie, tout contribuait à développer, dans cette riche intelligence, les plus beaux talents, les connaissances les plus variées.
Toutefois, au milieu de ces brillantes qualités, vous eussiez admiré une qualité plus radieuse encore; c'était sa ferveur religieuse. Elevé dans les principes de la religion chrétienne, il'en savoura toujours les divins enseignements, et fut, jusqu'à la mort, un de ses plus ardents défenseurs.
Pour qui l'avenir n'a-t-il pas des charmes, quand on est jeune, riche, d'une famille illustre ; quand surtout la gloire, avec ses couronnes, vous sourit et vous tend la main? Le jeune étudiant résiste à toutes les séductions de la vie. Son plan est arrêté, sa carrière va bientôt s'ouvrir. Il est chrétien, il ira consoler et défendre les chrétiens, et, s'il le faut, il les précédera dans la voie des martyrs.
Huit fois déjà, les empereurs romains avaient répandu le sang des chrétiens fidèles; la neuvième persécution commençait. Rome en était le foyer; c'est à Rome que Sébastien va demander un aliment à sa foi et à son zèle. Il se sent peu d'attraits pour l'état militaire, mais il comprend que sous le casque, ses allures seront plus libres, ses entrées plus faciles, partout où le sort des chrétiens réclamera sa présence. Il s'enrôle, en 283, dans l'armée de l'empereur Carin, qui ne monta sur le trône des Césars que pour être assassiné.
Comme nos ardents missionnaires, sous l'habit emprunté du marchand chinois, vont porter aux infidèles la civilisation évangélique, ainsi notre intrépide soldat remplit-il, au milieu des chrétiens ses frères, la mission sublime et périlleuse qu'il a choisie. En voici un premier exemple :
Les deux frères Marc et Marcellien, après avoir glorieusement confessé la foi du Christ, au milieu des plus violentes tortures, étaient pourtant sur le point de sacrifier aux idoles. Touchés par les cris plaintifs de leurs petits enfants, attendris par les embrassements de leurs épouses, vaincus, par les sanglots de leurs vieux parents, ils allaient souiller par une lâcheté indigne la couronne des confesseurs. Sébastien le sait. Il vole à la prison et parle à ses deux amis avec tant de force et d'autorité, qu'il fait passer dans leurs coeurs chancelants le feu sacré qui dévorait le sien. Captivés eux-mêmes par une doctrine si belle et si touchante, Nicostrate, greffier de la préfecture, Claude le geôlier, et seize prisonniers sont gagnés à Jésus-Christ. Ils demandent le baptême.
La chapelle Saint Sébatien (San Bastianu) est située au coeur du village de Scolca qui compte trois autres édifices religieux : l'église paroissiale Saint Mamilien (San Mamilianu) située à l'écart du village, la chapelle Saint Roch (San Roccu) sur la place éponyme du hameau d'Erbaggio et la chapelle Saint Simon (San Simone) qui ne présente plus que des ruines sur les hauteurs du village.
Tous les ans, le 20 janvier la population du village se regroupe dans cette chapelle pour une messe traditionnelle.
La chapelle date du XVIIème siècle. Son toit a été restauré suite à des fuites d'eau importantes et l'intérieur a subi une rénovation importante ainsi que sa façade principale.
Lors de sa visite apostolique à Scolca le 9 avril 1646, Monseigneur Marliani, Evêque de Mariana et de Accia déclare la présence de la chapelle : Nella Scolca v'è una cappellina dedicata a S. Sebastiano, fabbricata dall'istesso prete Sansone.
Statue de Saint Sébastien
Cependant une lumière miraculeuse environnait la tête de Sébastien. Etonnée de ce prodige, une femme tombe aux pieds de cet apôtre soldat. C'est Zoé, l'épouse de Nicostrate. Elle a perdu depuis six ans l'usagé de là parole, mais elle a compris que rien n'est impossible à celui qui parle au nom du Tout-Puissant. Elle fait signe à Sébastien de la guérir, et la croix imprimée sur ses lèvres lui rend l'usage de la voix ; plus tard elle donnera sa vie pour Jésus-Christ.
Chromace, préfet de Rome, va donner à l'Eglise une conversion plus éclatante encore. Tourmenté par les douleurs aiguës de la goutte, il apprend que Tranquillin, père de Marc et de Marcellien, a été guéri de cette affreuse maladie, en recevant le baptême, à l'instigation du fervent Sébastien. Dans l'espoir d'une si précieuse faveur, Chromace se fait instruire par le courageux soldat, qui le guérit et le baptise, ainsi que son fils Tiburce et toute sa famille. Quatorze cents soldats suivirent leur exemple.
Au faible Carin avait succédé l'empereur Dioclétien. Ce dernier, d'un esprit vif:et pénétrant, apprécia bientôt les qualités éminentes du jeune Sébastien. Il le nomme capitaine de la première compagnie de ses gardes; faveur immense , qui révélait toute l'estime et toute la confiance de Dioclétien pour notre héros.
Plus que jamais, Sébastien met au service de son prince et son courage et son épée. Toujours prêt à voler où son devoir de soldat l'appelle, il n'oublie pas cependant qu'il n'a vu Rome que pour fortifier ses frères les chrétiens, et adoucir, par l'aménité de son coeur, leurs dures et cruelles épreuves. Tout s'incline devant le capitaine des gardes prétoriennes, devant le favori de Dioclétien. Il pénètre partout, il visite toutes les douleurs, multiplie ses conseils et réserve toujours à son âme ardente les plus pénibles travaux, les suprêmes dangers.
Mais voici venir le moment où Sébastien, après avoir fidèlement rendu à César ce qui était à César, allait enfin rendre publiquement à Dieu ce qui est à Dieu. En 288, le feu de la persécution, un instant ralenti, se.réveilla plus furieux que jamais. Consolés, secourus, encouragés par le jeune officier des gardes, les chrétiens en foule marchaient généreusement à la mort, comme on marche à la gloire. Arrêtée une des premières sur le tombeau de saint Pierre, Zoé fut suspendue au-dessus d'un feu dévorant qui la suffoqua. Tranquillin fut lapidé sur le tombeau de saint Paul ; Nicostrate et Claude sont appliqués trois fois à la torture, puis jetés à la mer; cloués par les pieds à un poteau, Marc et Marcellien restèrent un jour dans cet état, jusqu'à ce qu'on les eût achevés à coups de lance. Et celui qui faisait tant de chrétiens, celui qui envoyait tant de martyrs au ciel, Sébastien soupirait ardemment après l'heure où il pourrait cueillir lui-même la couronne des bienheureux. Ses voeux vont être satisfaits.
Instruit qu'il était chrétien, et en même temps, l'appui de ses frères, l'Empereur fait comparaître Sébastien devant lui. Il lui reproche amèrement de favoriser la religion nouvelle, il l'accuse d'ingratitude et le presse de laisser là le Crucifié pour offrir de l'encens aux dieux de la patrie. Sébastien demeure inébranlable. Aussitôt, par ordre de Dioclétien, les farouches soldats de Mauritanie, habiles à tirer de.l'arc, se saisissent du capitaine disgracié, et font pleuvoir sur lui une grêle de flèches. On le croit mort. Mais la pieuse Irène, la veuve du saint martyr Catule, étant venue pour l'enterrer, s'aperçoit qu'il respire encore et le fait porter dans sa maison, où il recouvre promptement la santé.
Qu'ils étaient heureux les chrétiens de retrouver leur guide, l'âme de leurs conseils, cet athlète invincible qui leur marquait le chemin du ciel ! Qu'ils étaient fiers les soldats prétoriens d'apprendre que leur chef vivait encore! On voulut cacher Sébastien pour le soustraire à de nouvelles tortures. Il s'y refusa énergiquement, à cause de sa double qualité de chrétien et de soldat d'élite.
Loin de fuir la persécution, le hardi confesseur va au contraire marcher à sa rencontre. Il pénètre dans le palais de Dioclétien, se place sur un escalier par où devait passer l'Empereur, et prenant la parole avec cette sainte audace que donne une foi. vive et profonde : « Prince, dit-il, vos sanglants édits sont ceux d'un tyran. Vous commettez une criante injustice en faisant ainsi massacrer les chrétiens. Loin d'être rebelles à l'Etat, apprenez encore une fois qu'ils se font tous un devoir sacré de prier le vrai Dieu, pour la prospérité de l'Empire et le salut de l'Empereur. »
Etonné, en voyant devant lui un homme qu'il croyait mort, plus étonné encore de la hardiesse de ses discours, Dioclétien le fait prendre et conduire dans l'hippodrome, attenant à son palais, pour y être assommé à coups de massue. Ainsi termina sa glorieuse carrière le saint martyr dont nous donnons la vie : c'était le 19 ou le 20 janvier. On jeta son corps dans un cloaque de la ville, pour le dérober aux recherches des chrétiens. Mais une vertueuse dame, nommée Lucine, ayant appris cette profanation, fit secrètement retirer des égouts le corps de saint Sébastien. On l'enterra aux pieds des apôtres saint Pierre et saint Paul, et le cimetière dans lequel il fut déposé, porte encore aujourd'hui le nom de Catacombes de Saint Sébastien. Le pape Damase fit bâtir une église à l'entrée de ces catacombes, et c'est dans cette basilique, qui porte aussi le nom de Saint Sébastien, que l'on conserve ses vénérables restes et quelques-unes des flèches qui ont percé le corps du noble patricien.
Telle est la vie édifiante et célèbre du capitaine français qui fut passé par les armes de soldats mercenaires, pour avoir confessé et suivi la religion de Jésus-Christ.
Source : Bibliothèque nationale de France, département Philosophie, histoire, sciences de l'homme, 8-LN27-18741